personnalités excentriques et bizarres / extrait

 

 

Analyse caractérielle corrélative du groupe A « personnalités excentriques et bizarres »

     René LE SENNE aborde le problème de la personnalité schizoïde pour les caractères sentimentaux et apathiques. Nous avons bien là deux types secondaires pour lesquels il écrit : « L’envers de l’introversion, l’autre côté de la solitude, est l’incapacité de se syntoniser avec le milieu, ce qui est de notre temps exprimé par les termes de schizothymie, de schizoïdie ». Bleuler, Kretschmer et Minkowski considéraient eux que ces personnes, totalement reclus sur elles-mêmes et exclues de la société, recevaient à l’époque le diagnostic de « schizophrènes ».

     Dans « La Structure du Corps et le Caractère » (Ed Payot, 1930), Ernst Kretschmer consacre plusieurs chapitres aux tempéraments schizoïdes et le présente ainsi : « Bru­talité tranchante, insensibilité maussade, ironie, timidité de mollusque se dérobant imperceptiblement ; voilà la surface. Ou bien nous avons devant nous un individu qui se présente comme un point d’interrogation. Nous sentons quelque chose de fade, d’ennuyeux, et cependant de problématique ».

     R LE SENNE décrit le schizoïde comme ayant le plus souvent une forte secondarité, avec ce qu’elle comporte d’inhibition à l’égard des réactions aux excitations mais qui constitue le mur derrière lequel il se passe quelque chose. Mais il ajoute : « Mais naturellement ce quelque chose est d’autant plus fort que l’émotivité est plus puissante, d’autant plus enfermé dans la conscience qu’elle est plus inactive, de sorte qu’on retrouve vite parmi les schizoïdes les plus caractérisés des sentimentaux ».

     Lorsque Kretschmer définit la schizoïdie comme « un abri pour une sensibilité trop vulnérable » il ne fait que retrouver l’essence caractérolo­gique du sentimental : « Ils cherchent la solitude pour s’entourer du cocon de soie tissé par leur propre âme... ».

     Mais Kretschmer dans son descriptif souligne aussi l’appartenance aux troubles schizoïdes des passionnés ainsi que des flegmatiques très froids ; les uns et les autres sont émotifs, inactifs ou actifs, mais leur dénominateur commun est donc bien la secondarité. Enfin, le DSM V souligne une inhibition forte de l’émotivité que l’on peut en conséquence expliquer par la forte secondarité.

     Toujours dans le groupe A, se trouve la personnalité paranoïaque de laquelle ressort aussi une émotivité sous-jacente d’après le DSM V qui précise ; « des manques d’égard mineurs provoquent des réactions hostiles majeures et les sentiments d’hostilité persistent pendant longtemps. Ils sont prompts à la contre-attaque et réagissent avec colère à ce qu’ils ont perçu comme des agressions », même si les personnalités paranoïaques peuvent se comporter « de manière méfiante, dissimulée ou paraître assez froides et sans émotions ».

     Le besoin de contrôler leur entourage, le fait d’être rigides et très critiques vis-à-vis d’autrui et incapables de collaborer, tout en ayant de grandes difficultés à accepter eux-mêmes la critique, nous fait penser largement au descriptif du caractère passionné de type étroit. D’ailleurs R LE SENNE souligne que la paranoïa, fréquente chez le passionné, procède d’un rétrécissement de la conscience très net. Nous avons également vu dans le descriptif de ce caractère les ambitions démesurées du passionné étroit, ses fantasmes grandioses et irréalistes et la soif de pouvoir qui l’anime.

     Le DSM V rajoute que ces personnalités paraissent souvent « fanatiques » et « forment couramment des groupes fermés ou des sectes avec des personnes qui partagent leur système de croyance paranoïaque ».  Il y est aussi mentionné l’hypersensibilité sous-jacente, confirmant ainsi que nous avons bien à faire, en théorie, chez la personnalité paranoïaque à une personne émotive à la base et très certainement secondaire.

 

     Pour finir avec le groupe A, il est précisé sur le DSM V, concernant la personnalité schizotypique, « qu’entre 30 et 50 % des individus qui ont ce trouble ont un diagnostic concomitant de trouble dépressif caractérisé quand ils sont hospitalisés.  Le trouble est souvent associé à une personnalité schizoïde, paranoïaque, évitante ou borderline ».

     La personnalité schizotypique peut se manifester initialement pendant l’enfance ou l’adolescence par un côté solitaire, une mauvaise relation avec les pairs, une anxiété sociale, de mauvaises performances scolaires, une hypersensibilité, des pensées et un langage insolites et des fantasmes étranges. Ces enfants peuvent sembler bizarres ou « excentriques » et faire l’objet de moqueries de la part d’autrui. La corrélation est moins évidente mais semble confirmer également le diagnostic d’une personne émotive à la base, qui pourrait être pénalisée par un niveau d’activité assez faible : la racine de ce trouble pourrait donc se situer dans les caractères émotifs/ non-actifs.

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